Nous:  - "Qu'est ce qui vous a poussé à faire ce métier?"

 

 Alexandra Vorillon:  -"Tout a commencé en 2003 lorsque j’ai obtenu mon diplôme d’infirmière . Tous mes amis étaient alors artistes et j’avais le sentiment de ne pas être exactement à ma place dans le milieu médical. Découragée par le fait de ne pas avoir fait les 10 ans de solfège à la pratique du violon, je me suis dit que j’aimerais un art qui me permette de prendre du plaisir tout de suite. Je me suis inscrite à un stage de clown. Dans un premier temps, il s’agissait d’un loisir, mais mes formateurs percevaient chez moi une grande force comique et un physique atypique permettant d’être remarqué .

Je me suis ensuite installée près de Genève et le fait de gagner beaucoup d’argent ne me rendait pas vraiment heureuse. J’ai donc  opté pour une formation professionnelle de clown en alternance.

La rencontre avec Michel Dallaire, le canadien co-fondateur du cirque du soleil, m’a permis d’apprendre les mécanismes du rire et les techniques permettant de provoquer le rire chez le public. Et il existe des miliers d’astuces !"

 

 

Nous:  - "Est ce que vous pouvez nous expliquer comment vous procédez lors de vos interventions auprès des enfants?"

AV:  -"Il y a de nombreux aspects à ce métier et la scène n’est que la partie émergée de l’iceberg.

Tout d’abord, le métier de comique consiste à devenir un observateur et un technicien.  Le clown se moque de lui-même, l’acteur de one man show se moque de ce qu’il voit.

Ca paraît étrange, mais je ne peux plus regarder un spectacle sans décortiquer les mécanismes de jeu.

Par exemple , un rire général donne droit à cinq erreurs avant que le public nous « lâche ». Une onomatopée au moment où le public est en train de finir de rire, permet de relancer un rire général.

La sincérité fonctionne très bien et nos doutes d’artiste n’intéressent personne ! Je t’encourage à regarder l’art du rire : La chute sur youtube. Même si on est nul, le public ne lâche jamais quelqu’un qui essaie vraiment.

L’aveu de la nullité fait retomber dans le vrai. Quand on sent que le public nous lâche il vaut mieux l’avouer pour retomber dans le vrai.

Au niveau du mime, le fait de grandir à l’excès ou mimer en tout petit, provoque un décalage qui fait également rire.

Le cabotinage consiste à trouver mille façons de gagner du temps en parlant de détails sur soi.

Ralentir le temps ou l’accélerer est un bon moyen de gagner en rythme.

Faire des métaphores complétement décalées. (Comparer le terrorisme à du sable par exemple). Chronique de Nicole Ferroni sur France Inter.

La surprise fait rire aussi, il faut donc apprendre à surprendre.

En duo, il y en a un qui doit être sérieux et l’autre non, et les rôles s’inversent. L’un sera l’auguste et l’autre le clown blanc…

Pas facile de résumer en quelques lignes… Surtout que les humoristes sont comme les magiciens, donner les ficelles c’est démystifier la profession. Alors je m’arrêterai là.

 

Faire ce métier c’est aussi rencontrer des artistes et des actifs du spectacle qui aiment la même chose. Le spectacle est un domaine où de nombreux professionnels travaillent : Chargé de diffusion, chargé de programmation, technicien son, lumières, musiciens, comédiens, circassiens…Se croiser, se recroiser dans les festivals, c’est comme ça que l’on découvre des opportunités de collaboration. Ensuite, on se rend des services et un jour, on travaille ensemble !

L’aspect administratif est très complexe et demande beaucoup de recherche. Legislation associative, régime indépendant, subvention…L’intermittence est un statut, comme chômeur mais dans le spectacle. Il ne s’agit pas d’un métier ! ¨Pour l’obtenir, il faut 507 heures de travail minimum en 10 mois ou 43 dates de spectacles. Ce régime particulier nous fait côtiser plus que pour le régime général mais permet de percevoir une indemnité égale que l’on travaille ou non.

Enfin, ce travail demande beaucoup d’anticipation et une connaissance précise du réseau car un spectacle ne sera tourné que s’il est vu par des diffuseurs et programmateurs. En plus, lorsque ces professionnels voient ton spectacle en 2014, ils ne pourront le programmer qu’en 2016 !! Patience…"

 

 

Nous:  -"Est ce que vous pensez que le rire est un bon moyen pour soigner les gens et et d'améliorer condition leur vie?"

 

AV:  -"Oui, il est certain que le rire est un bon moyen de soigner. J’ai pratiqué la « théâtrothérapie » en Hôpital de jour adolescent et en centre d’accueil thérapeutique à temps partiel. Cette expérience m’a permis de constater que l’auto-dérision et le fait de jouer ensemble en improvisation permettaient un épanouissement nécessaire et important.

Le fait de jouer des scènes de vie nous permet de devenir acteur. Et être acteur, c’est prendre du recul sur les choses et faire des choix émotionnels.  Ainsi, les personnes apprenant à « jouer » apprennent sans le savoir à prendre les choses avec plus de spontanéïté et de légéreté.

 
                Nous: -"Que penses tu des thérapies sur le rire et les clubs de rire?"

 

AV: -"Si ça ne fait pas de bien, ça ne peut pas faire de mal. Pour moi ces clubs consistent à « rire ensemble ». Il y a un aspect qui me dérange dans cette forme de thérapie car l’humour de chacun est différent et il y a un côté « forcé » à ce genre de club. Néanmoins les exercices proposés peuvent être enrichissants. Pour ma part, une thérapie sur le rire, ça peut être un bon stage de clown plutôt qu’un club où l’on se force à rire ensemble."

Nous:  -"Pour quels types de personnes et quels types de lieux faites-vous des spectacles?"

 

AV:  -"J’ai commencé par jouer dans les MJC, maison des jeunes et de la culture. Les places sont difficiles à obtenir dans les auditoriums, mais ça peut être jouable dans le cadre de Festivals. Ce sont d’ailleurs les festivals qui sont mes principaux employeurs pour le spectacle depuis 3 ans. Certains festivals sont organisés par des associations, d’autre par les mairies.  Les particuliers ne représentent qu’une ou deux dates par an."

Nous:  -"Pouvez vous nous envoyer des photos et/ou vidéo que l'on puisse mettre dans notre dossier sur internet avec une autorisation de votre part, s'il vous plait ?

 

Evidamment prends les sur mon site. Je vous conseille vivement de regarder "L'art de rire" sur youtube et de l'intégrer à votre site.